Justice prédictive en "Cour"
La loi pour une république numérique promulguée le 7 octobre 2016 et publiée au JO du 8 octobre avait déjà amorcé un certain nombre de changements relatif à la modernisation de la justice, et le programme du président Macron ira encore plus loin.
L'une des mesures de son programme vise à doter les juges d'outils numériques d'aide à la décision, les avocats ont pour une fois un peu d’avance, car les outils permettant de déterminer l’issue d’une procédure existent déjà, et tout commence par le Big Data.
Le Big Data juridique devient public
Le Big Data est le nom donné à une masse importante de données conçues ou générées en ligne. Il n’existe pas donc pas un Big Data, mais des Big Data. L’un des volets de la loi LEMAIRE introduit pour le monde judiciaire la circulation des données et du savoir (Big Data) et intègre dans sa première section l’accessibilité au public de ces données (Open Data).
Art. L. 111-13 du Code de l'organisation judiciaire
« sans préjudice des dispositions particulières qui régissent l'accès aux décisions de justice et leur publicité, les décisions rendues par les juridictions judiciaires sont mises à la disposition du public à titre gratuit dans le respect de la vie privée des personnes concernées. »
En clair, une porte s’est ouverte vers une banque de données comportant des millions d’informations relatives à des décisions de justice, c’est ce qui caractérise l’Open Data (données accessibles). L’État a d’ailleurs ouvert la plateforme data.gouv.fr rendant accessibles des « jeux de données publiques françaises ».
Le Big Data judiciaire est désormais accessible aux Data Scientist, professionnels de la donnée qui savent l’exploiter et la faire parler.
Il est désormais possible de réutiliser ces données au-delà de leur usage premier.
Une start-up française a su saisir cette opportunité pour consolider son outil de recherche et d'analyse juridique.
Predictice : une plateforme d’aide à la décision
Le pari relevé par la société française Predictice est de vous assister dans vos décisions. En analysant les banques de données constituées des différentes jurisprudences et des textes de loi, les algorithmes identifient les risques et calculent la probabilité de résolution d’un contentieux, le montant des indemnités pouvant être obtenues ainsi que les moyens les plus influents ayant eu un impact sur la décision juridictionnelle qui a été prise.
Tout cela à l’aide d’algorithmes effectuant des recherches basées sur des millions de décisions de justice et permettant d’isoler les cas précis répondant aux critères que vous avez définis.
Il sera dès lors possible d’aviser vos clients avant le début de toutes procédures en vous appuyant sur des résultats mathématiques basés sur des millions de décisions rendues et non plus sur une appréciation subjective ou basée uniquement sur votre expérience professionnelle.
De plus, la technologie a été développée de manière à comprendre et analyser le langage naturel, ce qui permet à Predictice de vous présenter une interface de type « Google » permettant la saisie simple de vos critères. Du droit du travail au droit de la famille ; tout – à l’exception du droit pénal – peut y être traité.
Le droit pénal a été volontairement écarté pour des raisons éthiques, car l’analyse prédictive se base sur des banques de données de décisions rendues. Elle n’est pas en mesure de prédire l’avenir, mais simplement d’analyser des décisions passées et de les rapprocher des critères de votre affaire en cours. Predictice vous communique une tendance or une affaire de droit pénal ne se traite pas sur une tendance.
Vers une juridiction 3.0
Conscient de la valeur ajoutée pouvant être apporté par ce type de technologie, le barreau de Lille a déjà établi un partenariat avec cette start-up française et plusieurs cabinets font actuellement partie du cercle fermé des bêta testeurs de cette solution proposée en mode SaaS (Software as a Service : solution locative en ligne).
Un autre partenariat a également été établi avec les cours d’appel de Rennes et de Douai afin de mettre cet outil à la disposition des magistrats. Les tests en cours devraient permettre la mise en production de cette solution pour la fin de l'année 2017.
À la différence de l’intelligence Watson (cf. Maître ROSS, l’avocate sans robe...), ce type de solution n’a pas vocation à remplacer avocat et magistrat, ou à uberiser la profession. Les algorithmes se mettent au service du système judiciaire en tant qu'outils innovants d’analyse et d’aide à la décision.