Acquisition d'une œuvre d'art : puis-je déduire cette dépense de mon bénéfice ?
Vous venez ou souhaitez acquérir une œuvre d'art pour décorer votre cabinet libéral et vous vous demandez si cette dépense est déductible de votre bénéfice. ANAFAGC vous répond.
Principe
Lorsqu’un professionnel libéral relève du régime réel d’imposition (« déclaration contrôlée »), il dispose essentiellement de deux méthodes pour diminuer son bénéfice imposable :
- il peut soit déduire les dépenses professionnelles qu’il a payées au cours de l’année civile considérée,
- soit amortir le coût d’acquisition de ses actifs professionnels sur leur durée probable d’utilisation.
Comptablement, le coût d’acquisition d’une œuvre d’art n’a pas la nature d’une charge. En effet, cette dépense a pour contrepartie l’entrée d’un élément d’actif dans le patrimoine de l’acquéreur. Il n’est donc pas possible de déduire le coût d’acquisition de l’œuvre d’art du bénéfice imposable. Il pourrait donc être tentant d’inscrire l’œuvre d’art à l’actif immobilisé du fonds libéral afin de passer chaque année des dotations aux amortissements égales à une fraction de son coût d’acquisition. Cette pratique est malheureusement proscrite par les règles comptables, car l’œuvre d’art fait partie de ces actifs qui, n’étant pas susceptibles de se déprécier par le seul effet du temps, sont considérés comme non amortissables par nature.
Fiscalement, conformémént à l'article 93 du Code général des impôts (CGI), les dépenses pour être déductibles doivent être nécessitées par l'exercice de la profession. Pour l'administration fiscale, les dépenses qui ne se rattachent pas directement à l'exercice de la profession ne sont pas prises en compte pour la détermination du bénéfice, il en est ainsi notamment des « dépenses d'agrément ou somptuaires dont le rapport avec l'objet de la profession n'est pas établi (par exemple, l’achat d'œuvres d'art destinées à l'ornement d'un cabinet professionnel) » (BOI-BNC-BASE-40-10 n°50).
un régime fiscal d'exCeption
Un dispositif dérogatoire a néanmoins été institué afin de favoriser l’acquisition d’œuvres d’art. Il s’agit du dispositif de déduction spéciale des « acquisitions d’œuvres originales d’artistes vivants » (article 238 bis AB du CGI), qui permet de déduire du bénéfice imposable, de manière étalée, la totalité du coût d’acquisition d’une œuvre d’art créée par un artiste vivant et inscrite à un compte d'actif immobilisé à condition notamment que cette dernière soit exposée dans un lieu accessible au public ou aux salariés, à l'exception de leurs bureaux (par exemple, dans une salle d’attente). Ce dispositif permet de déduire, de manière extra-comptable, le coût d’acquisition de l’œuvre d’art, par fractions égales, du bénéfice imposable de l’année d’acquisition et des quatre années suivantes. L’effet obtenu est donc sensiblement équivalent à celui d’un amortissement fiscal sur cinq ans.
Toutefois, les professionnels libéraux qui exercent leur activité à titre individuel ou au sein d’une société à l’IR sont de facto exclus du bénéfice de ce dispositif. En effet, la déduction spéciale est également subordonnée à l'inscription d'une somme équivalente à un compte de réserve spéciale au passif du bilan de l'entreprise. Cette condition a pour effet d'exclure du dispositif les entreprises qui, sur le plan juridique, n'ont pas la faculté de créer au passif de leur bilan un compte de cette nature. C’est notamment le cas des entreprises soumises à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des BNC.
Par conséquent, seuls les professionnels libéraux qui exercent leur activité au sein d’une structure soumise à l’IS (de plein droit ou sur option) sont en mesure de bénéficier de cette déduction spéciale, étant précisé que la déduction s’imputera non pas sur leur rémunération individuelle, mais sur le résultat imposable à l’IS de la structure d’exercice.